[i575]                                                DE LA VILLE DE PARIS.                                                     313
DXCVIII. — Remonstrances au Roy sur la levée et solde des u mil Suisses demandés par Sa Majesté;
REDIGÉ ET ESCRIPT PAR MAISTRE LOYS DE SAINCT YûN, ADVOCAT DE LADITTE VlLLE.
i5 décembre 1575. (Fol. 247 v°.)
remonstrances trés humrles de la vllle de paris et des Bourgeois et Cytoiens d'icelle.
Au Roy leur souverain Seigneur.
Sire,
«Voz trés humbles el trés obéissans serviteurs et subjectz, les Bourgeois et Ciloiens de vostre ville de Paris, composez du Clergé, Court de Parlement, Chambre des Comptes, Court des Aydes, Prevosté de Paris, et des Bourgeois de chascun quartier d'icelle, faisans ensemble et representans avec nous, Prevost des Marchans et Eschevins de vostredite Ville, le Corps entier et universel d'icelle, s'estans assemblez par deux divers jours pour adviser sur les deux cens mil livres qu'entendez estre levez sur icelle vostre Ville et Généralité, pour le paiement de trois mil Suisses, faisans moillié de six mil, desquelz vostre Majesté faict estat durant quatre mois pour le secours de vostre Royaume;
"Ont esté d'advis, d'une commune et meure re­solution, de vous supplier en toute humilité rece­voir de bonne part les plaintes et dolleances de vostre pauvre Peuple, avec telle clémence que nous promect vostre royalle et naturelle bonté et telle que peult esperer de son Roy le fidel et obeissant sub­ject; et croire que leurs remonstrances ne procedent d'aucun instinct et mouvement de desobeissance ou reffroidissement de bonne volunté, ains seullement de grand zelle et desir trés affectionné qu'ilz ont à la conservation et manutention de l'honneur de Dieu el de vostre Estat.
«En premier lieu, Sire, comme la vertu, bonté et intelligence des Roys et grandz Princes est plus grande, et penettre plus avant que celle des autres hommes, selon qu'escript Xenophon, vostre bon plaisir sera de vous remémorer, representer et vive­ment imprimer la longueur et continuation des guerres intestines et civilles qui ont pris leur orri-gine par la fin des externes; à l'occasion desquelles vostre pauvre Peuple a esté tellement pillé, vexé et saccagé, sans aucune relasche ny moien de respirer
depuis l'année mil cinq cens soixante, jusques à pre­sent, qu'il ne luy reste que la voix casse et demlle, pour vous declairer et exprimer le mieulx qu'i luy sera possible ses oppressions et grandes calamité/..
"Depuis lequel temps, qui est de quinze années, les Majestez de Vous et de voz predecesseurs Roys, de trés recommandable memoire, ont esté secouruz, par les habitans et citoiens tant de vostreditte ville de Paris que païs circonvoisins, de la somme de trente six millions de livres, oultre la somme de soixante millions de livres ou environ qui ont esté fourniz par le Clergé de vostre Royaume depuis le­dict temps de quinze ans, sans lés dons et autres emprunetz el subeides levez extraordinairement tant sur laditte ville que sur les autres païs et provinces de vostre Royaume : somme suffisante, non seul­lement pour conserver l'estat de Vostreditte Majesté, mais aussy avec la terreur de l'encien nom des Fran­çois, vous rendre redoubté et refformidable à tous autres princes, potentatz et nations.
"Nonobstant lequel secours, voluntairement faict lant en purs dons, constitutions de rentes que subsides extraordinaires, les affaires de vostredict Royaume n'ont esté en rien plus advancées ny aulcun meilleur ordre estably.
«Au contraire, de grant et puissant que vostre­dict Royaume estoit en laditte année iu vc lx, il a esté contrainct passer par les mains des forces eslran-geres qui en ont tiré, succé et emporté le plus beau et le plus precieux, avec une extreme despence, oultre la substance de vostre pauvre Peuple, laquelle y a esté entierement consommée, et la perte indicible des plus grandz et expérimentez Cappitaines : telle­ment que l'on peult veritablement dire que voslre-dicl Roiaume est à present destitué d'hommes et espuisé de deniers, qui sont les vraiz nerfz d'un estat et monarchie.
"Ce que vosdiclz subjectz, Sire, ne veullent am-pliffier ny exagérer par aornement de langaige, pai­ée que la seulle verilé du faict et simple récit des choses passées est trop plus que suffisante pour os-
vu.
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